EXPOSITION
Arts sonores

Du 27 mai au 9 juin
 Mercredi-Vendredi : 17h-19h
Samedi-Dimanche : 14h-18h
Et sur rendez-vous


Église St-Philibert
rue Michelet, 21000 Dijon

Entrée gratuite, visites sur demande

Réalisé dans le respect des conditions sanitaires en vigueur.

 

Avec John Giorno, Henrik Håkansson, Christian Marclay, Philippe Parreno, Katie Paterson,  Roman Signer

Pour l’exposition « Sound & Vision », c’est dans les collections des Fonds Régionaux d’Art Contemporain de la grande région Bourgogne-Franche-Comté que Why Note a sélectionné un ensemble d’œuvres. Toutes sonores, que ce soit en discours ou en acte, elles soulignent la porosité des univers visuels et sonores, et l’importance du son par le prisme de productions plastiques d’artistes majeurs de la création contemporaine, issues des collections spécifiques des deux institutions. C’est dans l’espace de l’Église St-Philibert qu’elles se déploient, une occasion de découvrir ce lieu sous de nouveaux horizons.

Dès l’entrée dans l’Église St-Philibert, datant du milieu du XIIe siècle et rarement ouverte au public, le regard embrasse non seulement la beauté et la fragilité du lieu lui-même, augmenté de charpentes et étais en bois, prothèses permettant de soutenir les faiblesses de l’architecture usée par les remontées de sel, mais également les différentes œuvres qui parcourent l’espace. Un chant d’oiseau baigne les lieux, à droite un espace scénique est déserté de son performeur, à gauche une étrange circonvolution de câble intrigue et dans le lointain un piano à queue est flanqué de deux ventilateurs.

Philippe Parreno convoque un moment passé, étrange à tous points de vue, une performance d’Yves Lecoq, imitant à la perfection diverses voix issues de la pop culture, réalisée avec tout l’attirail nécessaire à une prise de parole – micro, enceintes… –, mais sans aucun branchement, obligeant les spectateurs à se rapprocher de l’imitateur pour l’écouter. Un moment d’intimité interrogeant le rapport à la mise à distance physique créée par l’espace scénique et à celle, psychologique, créée par la popularité de cet homme public. De ce moment ne reste que la trace sonore, écoutable au casque dans un environnement similaire à celui de la performance, les enceintes et le micro ici encore réduits à un décor et à la simple évocation du son, soulignant la présence absente du performeur.

Plus loin, un téléphone décroché au combiné surdimensionné est posé au sol. En suivant ses cent-cinquante mètres de long qui séparent le micro et l’écouteur de cet Extended Phone réalisé par Christian Marclay, tourbillonnants jusqu’à l’une des anciennes chapelles de la face nord de l’église, le spectateur atteint enfin « l’autre bout du fil ». Tout près de celui-ci est justement installé un autre combiné téléphonique à cadran, de taille standard celui-ci, disposé sur un socle. En décrochant son combiné, le visiteur peut entendre des voix lui déclamer des poèmes. Cette œuvre de John Giorno, Dial-A-Poem, propose plus de deux-cents poèmes récités par quatre-vingt artistes et déclenchés aléatoirement. À l’origine, il était possible de les écouter depuis n’importe où en composant un numéro de téléphone alors en service.

Suivant le chant d’oiseau audible depuis l’entrée, le visiteur se laisse guider vers la chapelle adjacente, dans laquelle deux enceintes diffusent un vinyle, dont de nombreux exemplaires à disposition sont empilés contre un mur. The Skylark. The Optimal Flight From Nowhere to Somewhere, d’Henrik Håkansson, diffuse un chant d’alouette que l’artiste est allé enregistrer dans l’habitat naturel de l’oiseau. En le gravant sur disque, il crée un dialogue entre la nature et la technologie, qui s’inscrit dans son travail portant sur les possibilités de cohabitation entre l’humain et la nature, et dans la droite ligne de sa série de portraits sur les oiseaux en voie de disparition.

C’est également un compromis entre nature et technologie qu’utilise Roman Signer pour sa pièce Piano, installée dans la croisée du transept de St-Philibert, en recourant à deux ventilateurs pour produire le vent nécessaire pour mouvoir des balles de ping-pong disposées sur les cordes d’un piano à queue ouvert. Celles-ci prennent alors le rôle du pianiste, dans un délicat ballet sonore, mais dont les sons luttent pour coexister avec le vacarme des appareils de ventilation.

Le paroxysme de la symbiose avec les éléments est atteint avec As The World Turns, de Katie Paterson. Logée dans le bras sud du transept, une platine vinyle joue un air au casque. Mais le son, comme le mouvement du disque, reste imperceptible par le visiteur : les Quatre Saisons de Vivaldi, sont ici lues au ralenti sur une révolution de vingt-quatre heures, en synchronisation avec celle de la terre. Pour lire l’intégralité du disque, quatre années sont nécessaires.

Qu’elles convoquent une performance par l’absence, qu’elles évoquent la complexité ou le lyrisme des communications, ou encore qu’elles tissent avec poésie un lien entre l’homme et les éléments, le temps et la nature, toutes ces œuvres sonores nous amènent à tendre l’oreille, à chercher à comprendre, à nous interroger sur nous-mêmes et sur notre rapport au monde. Installées dans cette église romane, dont l’histoire longue et complexe en a fait un lieu diminué, augmenté, fragilisé, consolidé, un espace hybride, poétique et chargé de mystère, elles viennent en donner d’autres perspectives, visuelles, sonores et réflexives.

Production
Why Note, FRAC Bourgogne, FRAC Franche-Comté,
avec le soutien de la Ville de Dijon